Je suis snob et je ne me soigne pas


Petit bréviair du snobisme
Dernièrement, j’ai testé le salon de thé Hermès. L’occasion de faire un petit tour par la
librairie et de dénicher un opus qui m’était jusqu’alors inconnu mais que j’ai dévoré avec délectation : Le petit bréviaire du snobisme par Antonius Moonen.
Inutile de vous dire que je me suis jetée dessus, et pas uniquement parce que ça me faisait un joli sac Hermès à arborer à la sortie.

Snob est un adjectif qu’on me lance depuis des années, utilisé le plus souvent dans un sens péjoratif, uniquement parce que j’ai quelques idées et que je n’en démords pas. Oui, je suis allée des
années durant en vacances à Saint-Tropez, et force est de constater que le village a perdu de son charme avec l’arrivée de nouveaux riches sans aucune éducation. Y aller en juin
ou en septembre semble être l’unique solution.

Parmi mes autres défauts, on peut lister mon allergie aux sanitaires publics, mon incapacité maniaque à emprunter chaussures ou vêtements (et à prêter les
miens), mon aversion pour le cheap bas de gamme sans aucun style, mon arrogance face à tout ce que je n’admire pas d’une façon ou d’une autre (et sachez-le, cela fait beaucoup de
choses), mon désintérêt de la chose publique (puisqu’elle est publique, elle ne me concerne pas), ou encore mon idée personnelle d’une bonne compagnie.

Pour autant, je suis à première vue tout ce qu’il y a de plus normal, quoique pouvant sembler un peu hautaine parfois (les talons y sont pour beaucoup : quand vous regardez les
gens de haut, ils le prennent souvent pour eux). Mes goûts sont éclectiques, et j’irais même jusqu’à dire que je suis bon public. En revanche, tombez dans le graveleux sans
humour, le pseudo-décalé sordide ou le manque de classe patenté, et ma générosité naturelle s’envole aussitôt.

D’un redoutable esprit de synthèse, j’analyse tout ce qui est à ma portée et ai la critique facile, au grand désespoir de quelques personnes faisant volontiers
preuve d’une certaine charité envers les fautes de goût évidentes, souvent orchestrée par des magazines qui savent que pour vendre il faut donner dans le neuf, quitte à ridiculiser nombre de
lectrices (et lecteurs, mais dans une moindre mesure) influençables.

A la lecture de ce bréviaire, j’ai donc pu constater que ce “défaut” dont on m’a longtemps affublée n’est en réalité qu’une qualité qui se perd avec les bonnes manières. Car
malgré ma fâcheuse tendance à n’en faire qu’à ma tête tout en imposant mon point de vue (seul valable, cela se vérifie chaque jour), je fais preuve d’une éducation à toute
épreuve, ce qui est d’autant plus désagréable pour les malheureux qui oseraient s’attaquer à moi.

Une question se profile donc à l’horizon : faut-il revendiquer son snobisme, au risque de faire des émules qui, loin de l’être naturellement, le seraient par mimique ? Car si le
snobisme est une qualité, le généraliser en ferait un banal trait de caractère. Alors oui, je suis snob, et non, je n’envisage pas de me soigner…

2 thoughts on “Je suis snob et je ne me soigne pas