Je prends les gens pour des cons
Ce titre quelque peu tapageur et un brin pompeux risque fort de m’apporter son lot de critiques acerbes et injustifiées (notamment de la part de personnes s’arrêtant au
titre, justement). Même pas mal, ce n’est pas ça qui va m’arrêter, bien au contraire : je me réjouis d’avance de cette déferlante (z’allez voir que là, pour le coup, rien ne va se passer).
Bref, oui, je l’admets : je prends les gens pour de cons. Mais attention : pas dans le sens “je me fous de la gueule de ceux qui ont le malheur de croiser mon chemin” (quoique…
ça peut aussi arriver, personne n’est à l’abri). Non, plutôt dans le sens “je ne te connais pas, à toi de me prouver que tu as quelque chose d’intéressant à dire”.
Non pas que je considère l’ensemble de l’espèce humaine comme un ramassis de crétins lobotomisés (quoique, là encore, il y a quand même de quoi en faire, des dîners de cons),
mais je ne m’intéresse tout bonnement pas aux individus vides d’idées. Ceux qui croient en la sacro-sainte télévision, ceux qui suivent le FN, ceux qui suivent
Sarkozy, ceux qui sont persuadés que l’écologie c’est pour “vendre des trucs inutiles et détourner l’attention des vrais problèmes”, ceux qui ne voient pas plus loin que le bout de leur
nez, ceux qui “découvrent” l’horreur humaine, ceux qui se battent contre des chimères, ceux qui jouent le rôle de moutons de Panurge avec un réalisme effrayant, ceux qui suivent
les émissions de télé-réalité et encensent les abrutis qui s’y donnent en spectacle, ceux qui ne sont pas capables d’aligner trois mots sans briller par leurs fautes de
syntaxe, ceux qui végètent dans leur petit monde sans jamais ouvrir les yeux sur celui qui les entoure…
Il y en a beaucoup.
Et malheureusement l’actualité démontre une fois de plus la bêtise humaine : vendredi, un petit garçon est mort dans un lave-linge. Son père voulait le punir d’avoir jeté le
dessin de l’une de ses camarades de classe dans les toilettes. Bref… Normal, quoi…
Donc oui, je suis une snob (mais ça je l’avais déjà avoué) qui méprise un peu toute cette foule
d’anonymes qui font bien de le rester.
Pourtant, parfois, je fais une rencontre. Imprévue. Inattendue. Surprenante. Quelqu’un d’intéressant, voire de passionnant, qui me fait
découvrir des tas de choses que je ne connaissais pas, qui me donne envie d’en savoir plus, d’en faire plus. Des gens qui illuminent une journée. Ces personnes, on les croise par
hasard et elles nous ouvrent d’autres perspectives, nous font rêver, réfléchir (ça ne fait pas de mal, contrairement à ce qu’en pensent certains), avancer…
Mais voilà, pour une personne qui changera votre vie, combien dénuées de bon sens devront défiler devant vos yeux ? Combien d’absurdités faut-il endurer (les pressés, en voiture, qui vont
s’escrimer à avancer sur le carrefour alors qu’il est bouché, juste parce que le feu est vert, bloquant ainsi ceux qui auraient pu profiter du prochain feu ; ceux qui ont
décidé qu’ils monteraient dans le métro avant de laisser les passagers descendre, c’est tellement plus simple ; ceux qui poussent dans les files d’attente, des fois que ça ferait
avancer plus vite ; ceux qui critiquent les vieux qui font la manche alors qu’eux-mêmes sont au chômage depuis des mois, ne réalisant pas que dans quelques années, à
force de ne pas travailler, ce sont eux qui feront la manche pour pouvoir bouffer ; ceux qui traversent au rouge quand ils sont piétons mais sont les premiers à râler quand ils
sont en voiture et qu’ils ne peuvent pas passer à cause de ceux qui font comme eux ; ou même tout simplement ceux qui tapent sur leur ordi / smartphone / télé qui ne fonctionne
pas, comme si ça allait arranger les choses ; le livreur qui bloque la rue – ou la sortie de parking – alors que l’emplacement place livraison est libre…) avant de
rencontrer quelqu’un qui vous fasse dire “ah, mais c’est pas bête, ça” ?
Alors oui, je prends les gens pour des cons. Et souvent je me demande si je n’ai pas raison…